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Fabien Flori : « La langue française est la deuxième langue des échanges économiques mondiaux et ça peut intéresser des jeunes moldaves qui veulent faire une carrière internationale »

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Un lecteur de français aidera les étudiants de l’Université d’Etat de Moldavie à apprendre les nuances les plus fines de la langue et de la culture française. Une convention trilatérale dans ce sens a été signée le 22 avril 2015 par Fabien Flori, directeur du Bureau régional Europe Centrale et Orientale de l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF), Pascal Vagogne, ambassadeur de la France en Moldavie et Gheorghe Ciocanu, recteur de l’Université d’Etat de Moldavie, fait qui dénote une forte volonté de coopération entre ces entités francophones.

M. Roman Kwiatkowski, directeur de l’antenne de Chisinau de l’AUF, M. Florentin Paladi, vice-recteur de l’USM, Mme Ludmila Zbanţ, doyenne de la Faculté de Langes et de Littératures étrangères et de nombreux professeurs étaient présents à la cérémonie.

L’institution de ce lectorat de français est très importante pour la Moldavie où il y a des lecteurs d’allemand, de polonais et d’autres langues, mais, paradoxalement il n’y avait pas de lecteur de français, alors qu’un tel dispositif existe dans tous les pays de la région.

M. Fabien Flori a fait le point sur cet événement exclusivement pour www.moldavie.fr

Aujourd’hui a eu lieu un événement assez prometteur – la signature de la convention trilatérale sur le lectorat de français. Pourquoi cette convention et pourquoi maintenant ?

Fabien Flori

Fabien Flori  : Tout d’abord, parce que l’AUF développe ce programme pas seulement en Moldavie, mais aussi en Roumanie, Pologne, Bulgarie et la Moldavie est un pays important à ce niveau-là, parce qu’il y a une francophonie qui est toujours vivante et il fallait trouver des partenaires qui soient intéressés pour s’associer à l’Agence de manière à mettre en place ce lectorat. Ainsi, on a trouvé une écoute très attentive auprès de l’Université d’Etat et puis, à l’Ambassade de France qui s’est de suite montrée réceptive, ce qui nous a permis à trois, en unissant nos forces, de mettre les moyens nécessaires pour faire venir quelqu’un de l’étranger jouer le rôle de lecteur, mais pas seulement le rôle de lecteur classique, parce qu’il aura aussi une fonction culturelle au sein de l’Université pour faire vivre la culture française, francophone et donc assurer le lien entre la société et l’Université et aussi entre l’Université et les classes bilingues, parce qu’il est très important que les élèves des classes bilingues aient l’opportunité de discuter avec des francophones et ainsi de pratiquer.

Vous avez déjà anticipé un peu ma question suivante qui porte sur le contenu des activités du lecteur de français.

Fabien Flori : Ce sera un lecteur de français natif, donc a priori un Français ou un Belge, mais plutôt un Français parce que l’ambassade de France est partie prenante au niveau financier. Notre objectif, au-delà de recruter un lecteur, c’est de recruter quelqu’un qui fasse vivre la francophone, parce que des professeurs de français – il y en a, mais quelqu’un qui soit aussi un acteur culturel et qui soit aussi un relais de ce que peut proposer comme offre culturelle l’Ambassade de France ou d’autres partenaires possibles, comme la Wallonie-Bruxelles, le Canada, l’AUF - c’est très important. Nous, l’AUF, on a une vocation transversale, parce qu’on n’est ni la France, ni le Canada, ni la Belgique – c’est le monde francophone. Je le rappelle quand même – notre siège est à Montréal et nous nous tenons à une équidistance de tous et nous essayons, comme un service public, de rendre service à la population francophone dans la mesure de nos possibilités.

Donc le candidat ou la candidate n’a pas encore été choisi(e) ?

Fabien Flori : Non, l’appel est en ligne, on reçoit des candidatures. On ne les a pas encore examinées, et il y aura une commission constituée de représentants de l’Université, de l’Ambassade de France et de l’AUF.

Comment trouvez-vous, en général, la vigueur de la francophonie en Moldavie ?

Fabien Flori : C’est une francophonie que je connais sans la connaître. Je la connais parce qu’ai des statistiques, je vois beaucoup d’élèves et d’étudiants moldaves francophones à travers des mobilités universitaires. Je la connais moins bien sur le terrain, parce que je ne viens pas tous les jours en Moldavie, mais je l’apprécie de plus en plus. J’espère par contre que la francophonie en Moldavie puisse être vécue comme un moyen de s’ouvrir vers l’Europe, parce que c’est un bon moyen d’ancrer la Moldavie dans la dimension européenne, aux côtés d’autres langues. Et puis c’est aussi un moyen de l’ouvrir vers des dimensions internationales. Je rappelle que le français est la deuxième langue pour les échanges économiques mondiaux et que ça peut intéresser des jeunes moldaves qui veulent faire une carrière internationale de pratiquer une autre langue, la langue française, aux côtés des langues comme l’anglais qui, aujourd’hui se sont imposées sur la scène internationale, mais qui ne suffisent pas - je prends le cas de l’Afrique, par exemple : si vous voulez travailler en Afrique aujourd’hui, le français est obligatoire. Or, l’Afrique c’est le continent qui s’éveille, où la croissance est en train d’exploser. La langue française ce n’est la propriété de personne. C’est peut-être encore plus que jamais la propriété des Africains, qui l’ont réinventée, cette langue, et qui la font prospérer.

Moi, je crois sincèrement à cette valeur-là. Si des jeunes moldaves se demandent aujourd’hui « Pourquoi apprendre la langue française ? », c’est plutôt par rapport à cela, moins par rapport peut-être à ce qu’on évoquait avant – la culture, les belles lettres ; cela fait partie de la langue française, mais ce n’est pas suffisant.

Quels sont, selon vous, les points faibles de la francophonie en Moldavie ?

Fabien Flori : Je ne dirais pas – points faibles. Je parlerais de ce que moi j’aimerais y trouver, mais que je ne trouve pas encore.

J’aimerais que l’AUF investisse davantage en Moldavie. Mais pour trouver des moyens d’investir dans ce pays, il nous faut des partenaires. Aujourd’hui, je n’en trouve pas beaucoup. J’ai trouvé l’Université d’Etat et ça c’est fait très vite. Si je trouve des partenaires dans d’autres secteurs – que ça soit pour soutenir des projets de recherches, des projets de mobilité, des projets culturels liés à la pratique de la langue française dans le milieu universitaire, l’AUF est prête à s’investir dans ce pays, comme elle s’est investie ailleurs.

Je crois qu’il y a une vraie prise de conscience à faire au niveau de la société civile en Moldavie par rapport à la francophonie, parce que, pour en être le témoin, je vois beaucoup de jeunes moldaves être mobiles grâce à la langue française. Par exemple, j’ai été à Cluj hier, en Roumanie (Cluj est la capitale européenne de la jeunesse 2015) et on a fait venir une quinzaine de jeunes moldaves dans le cadre de ce festival, parmi une vingtaine d’autres nationalités, et c’est très intéressant de voir ça – c’est très intéressant pour eux de voir qu’il y a des francophones dans le monde entier - de l’Azerbaїdjan, en passant par le Kazakhstan, jusqu’à la Russie et ce qui est important dans le cadre de ce festival, c’est de voir un Russe à côté d’un Ukrainien ; ou alors un Arménien à côté d’un Azerbaїdjanais. Nous essayons de promouvoir en Moldavie les valeurs de la francophonie, parce que la Moldavie a besoin de s’ancrer à l’Europe, elle a besoin de valeurs solidaires et nous essayons modestement, à petite échelle, de véhiculer cette dimension solidaire.

Est-ce que cela voudrait dire que l’AUF a des projets envisagés pour la Moldavie et que le pays doit accroître sa capacité d’absorption de ces projets ?

Fabien Flori : J’ai, par exemple, cet après-midi, une rencontre au Ministère de l’Education. Je vais faire une proposition de projet et j’espère qu’elle sera retenue. Cette proposition vise la possibilité de nous unir sur un projet conjoint, l’AUF apportant des moyens financiers, son expertise et son réseau – je rappelle que l’AUF c’est plus de 800 universités dans 100 pays – pour créer des opportunités pour des jeunes étudiants et doctorands moldaves francophones de faire des stages scientifiques de haut niveau pouvant durer plusieurs mois. Nous sommes prêts à y investir financièrement, mais on a besoin d’un effet de levier local, une petite participation financière locale, pour qu’il y ait une implication locale, parce que c’est très important l’implication.

Nous, on n’est pas l’Europe, on n’a pas de moyens colossaux, mais on est plus petit et plus réactif, on est capable des monter très vite des projets qui véhiculent des valeurs qui sont un peu différentes – on s’intéresse souvent au profil psychologique, au projet même, davantage qu’à la simple capacité de rédiger un projet en anglais.

Et pour revenir à ce lectorat français – est-ce que d’autres universités auront aussi l’opportunité d’en bénéficier ?

Fabien Flori : Je l’espère. Si des partenaires sont prêts à s’associer – que ça soit l’Ambassade de France et l’université en question une nouvelle fois – je pense qu’on pourrait envisager un deuxième lectorat en Moldavie. Mais ce n’est pas le seul projet – il y a le lectorat et puis il y a tout ce qui va avec. Je prends un exemple parmi d’autres – on va recréer cette année des bourses de mobilité au niveau master régional pour des jeunes qui veulent être mobiles.

Cela vient en complément de ce dispositif-là, parce qu’un jeune qui veut entrer dans un système de mobilité régionale francophone a besoin d’être préparé au niveau de la langue française et donc il a besoin de quelqu’un qui le conseille, qui lui donne la possibilité d’avoir des échanges en français pour se sentir à l’aise et c’est complémentaire - tout ça c’est un tout. On ne peut pas s’attacher à la mobilité et ne pas regarder ce qu’il y a eu au départ ; il y a la recherche, il y a l’université, il y a la culture, il y a la discussion, il y a le fait de travailler et de boire un café avec un francophone et ça fait vivre la francophonie, c’est dans notre cœur et c’est ce qu’on a envie de faire.

Merci, Monsieur Flori, et bonne chance pour ce nouveau projet !

Notons pour conclure que l’AUF est représentée en Moldavie par son Antenne qui a fêté ses 15 ans en 2013.

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