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Des ponts au (Forum) pluriel – Pontes

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Article par Emilian Galaicu-Păun

Emilian Galaicu-Paun et Jean-Jacques Combarel, Président des « Moldaviens » (à droite)

Je le sais, par ma propre expérience, comment voit le jour un courant littéraire, une génération de poètes ou, dans des termes plus récents, un mouvement de jeunes non-conformistes, peu importe son nom : « fracturisme » ou « Human zone ». Depuis quelques années je suis le témoin, et parfois le participant depuis la galerie des supporters (c’est-à-dire j’ai participé aux débats organisés mensuellement par le Forum Pluriel à La Librairie 9) de l’affirmation d’une nouvelle génération d’historiens ayant fait leurs études en Roumanie et en Occident (Igor Caşu, Sergiu Musteaţă et Virgil Pâslariuc sont PhD en Histoire de l’Université « A.I.Cuza » de Iaşi ; Andrei Cuşco et Victor Taki sont PhD en Histoire de l’Université Centrale Européenne de Budapest ; Petru Negură est PhD en Sociologie de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales de Paris).

Les historiens du « Forum Plural »}}

Dans mon opinion, la présence de plus en plus visible de cette génération dans la vie de la cité – par des lancements de livres, colloques, conférences nationales et internationales etc., etc.- est un signe sûr d’un changement de visage de notre intelligentsia : la plus ou moins cultivée intellectualité des années ’90 est remplacée par cette très instruite intellectualité scientifique.

leur fallait une tribune, car les idées ne manquent pas. Les débats organisés par le Forum Pluriel ont préparé le terrain pour ce qui allait devenir la Revue d’Études Sud-Est Européennes Pontes, éditée en partenariat avec la chaire UNESCO de l’Université d’État de Moldavie, et qui en est aujourd’hui à son cinquième numéro

Atmosphère accueillante à la Libraire 9

Le lancement de ce dernier opus à nouvelle allure graphique (super travail, M.Ion Cernavca !) a eu lieu mardi, le 8 décembre 2009. La revue présente de nouveaux auteurs et éditeurs et se déclare ouverte à de nouveaux horizons de recherche (je cite : « nous nous proposons d’initier un dialogue académique qui transcenderait les limites disciplinaires consacrées et qui pourrait contribuer, dans le temps, à la création d’un espace de débats, échange d’idées et développement d’une approche innovatrice dans le domaine des études est et sud-est européennes »).

Le dernier numéro de la revue « Pontes »

Le leitmotiv de toutes les interventions a été sa comparaison aux Annales, la célèbre revue française qui avait vu le jour en 1929, ce qui signifie que la barre est une placée très haut, voire même maximaliste. Comme si on disait : « Soyez réalistes –demandez l’impossible ! ».

S

J’omets les discours proprement-dits (sans oublier celui de M. Sarov, qui a été absolument magistral) et je commence à feuilleter la revue. La première chose qui me surprend est son plurilinguisme : Victor Taki et Andrei Cuşco écrivent en anglais ; Petru Negură, Martin Hauser et Sylvie Hauser-Borel font leurs interventions en français, Ruslan Rahimov – en russe ; Virgil Pâslariuc, Igor Caşu, Andrei Prohin, Daniel-Valeriu Boboc et Diana Dumitru exposent leurs points de vue en roumain. L’allemand est présent aussi par la cronique de Sergiu Musteaţă sur Wer sind die Moldawier ? Rumanismus versus Moldawanismus in Historiographie und Schulbuchern der Republik Moldova, 1991-2006, de Stefan Ihrig, Stuttgart, 2008. En ce qui concerne le champ thématique, celui-ci s’étend de l’analyse micro-historique de Virgil Pâslariuc qui, à partir du cas d’une nonne du monastère de Curăturile ayant donné naissance à un enfant en 1813, décrit tout le long de 30 pages l’ensemble du système administratif, laïque et monacal, de la région de Bessarabie après son annexion de 1812, pour passer ensuite aux « Rituels du pouvoir » (lire l’étude de D.-V. Boboc consacrée à la visite du roi Ferdinand I en Bucovine et en Bessarabie en mai 1920), sans oublier l’« Implication des élites intellectuelles dans le mouvement national de Bessarabie, avant et après 1918 » (L. Crudu) ni l’« Image des Bessarabiens dans la vision de l’administration civile-militaire roumaine (1941) » (D. Dumitru) avec, pour conclure sur une note majeure, l’« Opinion publique en République Soviétique Socialiste Moldave dans le contexte de la déstalinisation et de la révolution hongroise (1956) » (I. Caşu). L’esprit critique est bien présent dans la revue par des réflexions, y compris sur des livres « à problème » (comme par exemple, les Mémoires de Grigore Eremei ou de I.I. Bodiul, ainsi que l’étude de I. Levit, « Год судьбоносный »…) ce qui fait de Pontes non seulement « une plateforme de la nouvelle génération de chercheurs dans le domaine des sciences humaines et sociales de la Moldavie », mais aussi un club et un espace de débats intellectuels avec cartes sur table. Enfin, mais pas en dernier, l’imposant numéro 5 de la revue Pontes –qui excelle dans toutes les catégories - est une vraie carte de visite de la plus instruite génération de jeunes chercheurs de chez nous.

Article repris sur le site http://www.europalibera.org

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